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Je n’ai pas l’habitude sur ce blog de faire dans la prospective politique : déjà que la situation est assez compliquée, faire des plans sur la comète me paraît assez incertain, voire risqué. Ceux qui prédisent le futur se trompent invariablement. Pourtant, au risque donc de me tromper lourdement, je ne peux pas m’empêcher de vous faire part d’une petite réflexion qui m’étreint à l’instant.

Une grogne monte. Elle est palpable. Contre l’économie, contre la politique, contre la technologie (ou le mauvais usage de celle-ci), contre beaucoup de choses en fait. C’est un nuage noir qui gronde et approche. Tout le monde peut le voir, l’entendre, le sentir arriver, à commencer par les principaux concernés, ceux contre qui est dirigée cette vindicte latente, presque lancinante. Ce serait sous-estimer notre système que d’imaginer qu’il ne voit pas, qu’il n’entend pas.

Des idées neuves pointent le bout de leur nez, d’autres enterrées refont surface. On parle de renouveau démocratique, de nouvelle constitution, de sixième république, de démocratie liquide, de changement de cap, etc. C’est dans l’air. L’atmosphère s’électrise, la cocotte-minute gigote sur le feu. Pour certains, la soupape de décompression est prête à céder. Pour d’autres, le Grand Soir est proche.

Eh bien, je fais devant vous un pari. Celui-ci n’engage que moi, bien entendu. Mais je suis prêt à parier que ce changement arrivera. Mieux, il arrivera plus tôt que nous le pensions. Sarkozy parle déjà de multiplier les référendums s’il est réélu à la présidence de la république, et ce n’est que le début. D’autres s’engouffreront dans la brèches et parleront nouvelle constitution, république revisitée, réformée, assainie. Parce qu’ils y ont tout intérêt.

On pourrait appeler cela le principe Fifa, ou le syndrome « Les Républicains » peut-être : pour pérenniser un système à bout de souffle, mais dont on tire avantage, mieux vaut parfois tirer la chasse et recommencer de zéro, de manière à être au premier rang quand les nouveaux rôles, les nouvelles responsabilités, devront être réassignées. Quand on redistribuera les parts du gâteau, en somme. Maintenant que je décris cette hypothèse, je pense bien sûr à Matrix et à son Architecte.

Vous verrez que ceux qui appellent à un renouveau démocratique seront ceux qui penseront en tirer le plus grand intérêt. Une fois qu’on aura rebattu les cartes, on reprendra les bonnes vieilles habitudes de trafic d’influence, de luttes de pouvoir, de détournements de fonds et d’opinion, mais avec la légitimité d’avoir tout recommencé et d’avoir donné sa chance au « bon peuple ».

Notre système tend à chercher l’efficacité. Si cette efficacité est affectée par un sentiment d’illégitimité, alors le système se purgera de lui-même. Il fera le ménage pour survivre. Aussi faisons attention : les prochaines « révolutions » pourraient bien être un pas supplémentaire vers l’oppression. Aussi soyons vigilants avec ceux à qui nous donnons les clefs et en qui nous plaçons nos espoirs.

Photo : Glenn Halog (CC BY-NC, via Flickr)

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